Restitution. Marc Copland parvient en quelques notes à faire surgir une foule compacte de souvenirs et d’images magnifiques. Ce n’est pas les notes qu’il jouent, mais le silence qui les suit, ou le son des autres musiciens du trio qu’il laisse alors danser au premier plan, tout imprégné des couleurs subtiles qu’il nous a fait entendre d’abord, que ce soit ces petits riffs dansants et impressionnistes, ou ces longues phrases aériennes et délicates. On a l’impression d’un photographe ou d’un cinéaste, qui aurait capté la magie unique d’un lieu ou d’un être et qui vous la restitue dans cet étrange médium qu’est la musique. Son art est du domaine du reportage, de la réminiscence. Conteur, il nous rend présent un ailleurs merveilleux : «Le merveilleux n’est pas d’ici, mais je l’ai vu. Ecoutez…» De là l’incroyable sentiment de voyage qui vous tient suspendu pendant tout le concert, comme si le pianiste, devenu votre biographe, mêlait à votre histoire les siennes, dans un film Nouvelle Vague dont vous seriez le Jean-Pierre Léaud. Drew Gress et Bill Stewart ne déméritent pas de cet art de la restitution en soutenant magnifiquement ses développements vastes et aventureux.

MARC COPLAND TRIO Marc Copland: piano. Drew Gress: contrebasse. Bill Stewart: batterie. Festival AMR, Genève, 2009